| EXERCICE 14, UNITÉ IV 1.1. Ajouter en gardant la même perspective
CONSIGNE Dans ces différents extraits : - Repérez le premier argument à l'appui duquel vient s'ajouter l'argument introduit par de plus ; - Trouvez la thèse que soutient l'auteur à l'aide de ces deux arguments.
1. La négociation des identités des chômeurs de longue durée Ces chômeurs de longue durée qui assument un tel renoncement à l'emploi sont catégorisés par les agents de l'ANPE [Agence nationale pour l'emploi] comme des « demandes mortes ». C'est ici l'estimation de très faibles chances de reclassement dans un emploi futur qui est au principe d'une exclusion de la catégorie de chômage. Cette représentation s'appuie sur le repérage de quelques traits saillants et ostensibles, qui suffisent à discréditer leur porteur (« être âgé », « avoir de sérieuses difficultés de santé ») car ils sont tenus pour des obstacles indépassables à la reprise d'un emploi. Ces attributs ont une fonction stigmatisante puisqu'ils occultent toutes les autres caractéristiques du chômeur et suffisent à résumer sa situation ainsi réduite à un trait essentiel. Pour les agents de l'ANPE, cette disqualification est définitive, ou au moins explicite et univoque, et surtout largement indépendante de l'interaction, car ces stigmates sont visibles, matérialisés, donc objectivables car manifestes pour tout le monde. De plus, affectant généralement l'apparence physique, ils paraissent coller à la peau, faire corps avec leur porteur, d'autant plus qu'ils sont irréversibles. Enfin, la plupart du temps, ils étaient déjà enregistrés sur les dossiers individuels et faisaient partie de la mémoire écrite de l'institution. (1)
2. Dans la relation face-à-face avec les professionnels de l'ANPE, ces chômeurs s'engagent rapidement dans des stratégies de réclamation qui traduisent le sentiment de ne pas parvenir à faire admettre ce que l'on considère comme ses droits. Tous ressentent un déphasage croissant entre leurs aspirations et les services qu'il est possible d'espérer de l'ANPE, qui sont jugés « inutiles » ou « inadaptés ». Ils vivent leurs relations avec une ANPE réduite à une agence de « distribution de stages » comme largement circulaires, perpétuel recommencement du même, sans déblocage de la situation ni progression dans la résolution de leurs difficultés face à l'emploi. Ces chômeurs ont le sentiment de toujours se retrouver au « point zéro », parce que les agents leur refusent l'accès à des emplois ou à des dispositifs « crédibles » (permettant le retour à l'emploi) et leur dénient ainsi l'identité de demandeur d'emploi. De plus, dès le début de l'interaction, ils sont confrontés à des propositions identitaires qu'ils rejettent et contre lesquelles ils se défendent : ils sont sommés de fournir une explication à la prolongation de leur chômage, de s'expliquer, de rendre des comptes. Dans la plupart des cas, une question centrale pour la définition des identités des chômeurs est explicitement posée : « Etes-vous prêt à travailler ? ». Enoncer cette question, c'est demander au chômeur de confirmer la catégorisation en cours (il n'est pas considéré comme prêt à travailler), et cela contribue d'emblée à faire surgir une distance entre les points de vue des acteurs. (1)
3. Le droit d'auteur est-il soluble dans l'économie numérique ? Les principales justifications du droit d'auteur dans l'analyse économique mettent l'accent sur l'aspect incitatif de cette forme de protection dans une logique d'efficacité. La première forme d'incitation concerne la création. Le droit d'auteur n'est pas seulement une récompense ex post du travail d'un créateur, c'est aussi un moyen de l'inciter à créer davantage. Les arguments liés aux incitations à la création sont cependant assez faibles ; d'abord parce que l'auteur peut être mû par d'autres éléments que la rémunération économique (propagation de ses idées, désir de reconnaissance...). De plus, d'autres moyens d'intervention, comme le droit social, la subvention ou la fiscalité, peuvent s'avérer plus incitatifs. L'aspect incitatif du droit d'auteur s'avère beaucoup plus intéressant si l'on considère son effet, non plus sur le créateur lui-même, mais sur son producteur ou plus généralement sur l'intermédiaire à qui l'auteur cède ses droits et qui s'engage dans la diffusion des œuvres sur le marché. (2)
4. Si les menaces pesant sur la mise en œuvre du droit d'auteur existent depuis longtemps dans l'univers analogique, elles s'accentuent […] considérablement avec le développement des technologies numériques. Plusieurs facteurs favorisent en effet les comportements de passagers clandestins. Le numérique met à la disposition du grand public des moyens sophistiqués de duplication des œuvres d'une qualité équivalente à celle de l'original à des prix de plus en plus faibles. Les contenus sont reproductibles et distribuables à des coûts marginaux non significatifs. Une fois le contenu mis sur l'Internet, le coût de production et de distribution d'une copie supplémentaire est quasiment nul. De plus, l'ubiquité, l'anonymat, la rapidité des transmissions, les techniques de brouillage, la décentralisation des utilisations, le nombre et la diversité des sites à surveiller sont autant de caractéristiques technologiques rendant potentiellement coûteux la mise en œuvre des droits d'auteur, la détection des contrevenants et la répression des trafics. Les problèmes classiques de passagers clandestins sont donc largement amplifiés, qu'il s'agisse de véritable piratage ou de simples copies privées. Le premier domaine touché par la piraterie est la musique ; le cinéma est aussi devenu un formidable enjeu pour la contrebande audiovisuelle avec le développement de l'internet et de supports comme le DVD. L'Asie et les pays de l'Est notamment ont développé de véritables industries de la contrefaçon à grande échelle. (2)
5. La distinction simpliste entre le droit d'auteur qui défend un droit naturel de l'auteur et le copyright qui protège surtout les investissements économiques du producteur ne témoigne qu'en partie de la réalité. L'aspect patrimonial du droit d'auteur se justifie, nous l'avons vu, selon une logique économique assez identique à celle du copyright. De plus, les évolutions économiques et les diverses conventions internationales tendent à rapprocher les deux législations. La convention de Berne qui définit la notion de propriété intellectuelle depuis 1886 a été révisée en 1971 pour le cinéma et en 1991 pour les logiciels informatiques. Il a fallu attendre 1996 pour que les accords internationaux abordent la question de la protection des contenus dans un univers numérique. Surtout, il nous semble que par delà les conflits possibles entre auteurs et producteurs, la véritable question économique que pose la réglementation en matière de droit d'auteur comme en matière de copyright est plutôt celle du conflit entre les intérêts des auteurs et des producteurs d'un côté et ceux des utilisateurs de l'autre. (2)
(1) Demazière D., 1992, « La négociation des identités des chômeurs de longue durée », Revue Française de Sociologie, vol. 33, n° 3. (2) Farchy J., 2001, « Le droit d'auteur est-il soluble dans l'économie numérique ? », Réseaux, n° 110.
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