| EXERCICE 85, UNITÉ IV 3.3. Rectifier
CONSIGNE Précisez l'idée fausse que corrigent les phrases où est employé en réalité.
EXEMPLE Aristote donnait quatre sens différents au mot « cause ». Du point de vue pratique, il signifie le phénomène qui en produit un autre. Mais l'effet devient bientôt causal à son tour et en réalité, le monde se trouve constitué par un engrenage de nécessités dont chacune représente à la fois un effet et une cause. (1)
RÉPONSE Cela corrige l'idée que certains phénomènes pourraient être classés comme des causes et d'autres comme des effets.
1. Confinée dans l'étude de la raison consciente, l'ancienne psychologie ne tenait aucun compte des influences inconscientes qui, en réalité, sont la source de tous les actes de l'animal à l'homme. Elle séparait complètement l'instinct de la raison. Pour expliquer la conduite des animaux, on avait créé une de ces théories mystiques dont les sciences sont encore pleines. La bienveillante nature leur aurait donné une aptitude spéciale, l'instinct, permettant de se conduire sans raisonner. On différenciait l'instinct de la raison en assurant que le premier constitue un mécanisme, obligeant les animaux à faire toujours les mêmes choses de façon invariable. Beaucoup de savants, Descartes notamment, considéraient l'animal comme un simple automate répétant aveuglément des actes identiques, sans pouvoir les changer.
2. [dans certains actes] la conduite varie suivant les circonstances et présente, par conséquent, les caractères fondamentaux de la raison. C'est ce qui fait dire à de savants naturalistes, le professeur Bouvier notamment, que les insectes raisonnent comme l'homme. En réalité, il semble plus exact de supposer que l'animal ne raisonne pas comme l'homme, mais possède des modes de connaissance différents des nôtres. Ce serait eux qui détermineraient la conduite de certains moustiques, le culex pipiens notamment. (1)
3. A l'époque où Renan visita Athènes, elle n'était qu'une poussiéreuse et malpropre bourgade, mais il la vit à travers ses souvenirs classiques : « L'impression que me fit Athènes, écrit-il, est de beaucoup la plus forte que j'aie jamais ressentie. Il y a un lieu où la perfection existe, il n'y en a pas deux. C'est celui-là. Je n'avais jamais rien imaginé de pareil. » Quel poète ! Aussi le lira-t-on longtemps, mais comme on continue à lire les Mille et une Nuits, c'est-à-dire sans beaucoup y croire et en se méfiant extrêmement de ses portraits et de ses classifications. Ce n'est pas, en effet, donner une idée très sûre des choses que de qualifier Néron « d'histrion » et d'assurer que Marc-Aurèle symbolise la fin du monde antique, qui persista en réalité bien des siècles après lui. Il eût été autrement intéressant, mais aussi plus difficile, de montrer comment ce monde antique, au lieu de mourir, se transforma. (1)
4. Les causes réelles des événements historiques, même les plus frappants, sont fort difficiles à connaître. Nous montrerons […] que, de toutes les méthodes de reconstitution du passé, une des plus employées, le témoignage, est la moins fidèle. Sa valeur est en réalité très faible, non pas seulement en raison des difficultés de bien observer, mais encore parce que les observations réalisées donnent lieu à de trompeuses généralisations.
5. A une époque bien récente encore, d'éminents historiens, tels que Renan, s'imaginaient que les Grecs avaient brusquement surgi dans l'histoire, possesseurs d'une haute civilisation. Nous savons aujourd'hui que bien avant les Grecs, les peuples de la Chaldée et de l'Egypte avaient lentement élaboré tous les progrès dont la civilisation grecque fut la floraison. Pour préparer l'édifice de cette civilisation il fallut en réalité quatre à cinq mille ans d'efforts, répartis des plaines de la Chaldée aux rives du Nil. La culture grecque pendant les époques voisines de Périclès, représentait l'apport de plusieurs civilisations fondues en une seule. Ce fut donc en Asie et dans le nord de l'Afrique, non en Grèce, que la civilisation grecque eut son origine.
6. Au premier rang des grandes causes déterminantes de l'histoire figurent les influences ancestrales, c'est-à-dire l'ensemble des aptitudes que chaque être apporte en naissant. Ces forces, nous les avons déjà signalées en étudiant leur action sur la formation de notre personnalité morale. C'est de l'âme des morts que l'âme des vivants est formée ; c'est en nous-mêmes et non dans les cimetières que reposent en réalité les disparus. Chaque être venu à la lumière a derrière lui de longs siècles d'existence et reste toujours influencé par son passé.
7. Chaque race possède des qualités et des défauts que le temps ou l'éducation ne modifient guère. Les institutions, la langue et les arts d'un peuple ne se transforment que par une évolution assez lente pour les mettre en rapport avec la mentalité ancestrale de la race qui les accepte. Quand les peuples semblent adopter des croyances, des institutions, des langues et des arts différents de ceux de leurs ancêtres, ce n'est, en réalité, qu'après les avoir profondément transformés. Le brahmanisme, le bouddhisme, le christianisme, l'islamisme, ont provoqué des conversions apparentes chez des races entières, mais en passant d'un peuple à un autre, ces religions ont beaucoup changé. Transporté en Chine, le bouddhisme y devint rapidement méconnaissable ; l'islamisme de la Perse est autre que celui de l'Arabie ou de l'Inde.
8. L'enseignement de la morale doit avoir pour but final, non d'apprendre par cœur des principes rationnels qui, en réalité, influencent rarement la conduite, mais de fixer dans l'inconscient le sentiment du devoir, indispensable quelle que soit la situation occupée.
9. L'observation démontre que les croyances s'usent avec le temps. Mais pour qu'elles perdent entièrement leur prestige sur les âmes, il faut qu'une foi nouvelle vienne les remplacer. Le processus de cette évolution se révèle toujours le même. Le pouvoir de la foi, d'abord très grand, finit par décliner et s'affaiblit graduellement jusqu'au jour où, de la croyance primitive survivent seulement les rites et les symboles. Respectée encore, l'ancienne croyance a perdu en réalité son influence directrice. C'est alors qu'une croyance nouvelle peut germer sur les débris de celle dont vivait seulement le souvenir.
10. Une croyance religieuse usée par le temps peut-elle se changer en croyance rationnelle ? L'histoire ne fournit guère qu'un seul exemple d'une telle transformation. C'est celle effectuée par le protestantisme lorsqu'il prit la forme dite libérale. Dans cette dernière évolution du christianisme, la conception d'un Dieu laissant périr son fils dans des supplices pour expier les fautes de ses créatures est complètement rejetée. Le Christ a perdu sa divine origine et n'est plus considéré que comme un simple moraliste ayant prêché d'utiles vérités. Ainsi transformé, le christianisme n'est plus, en réalité, une religion et ne saurait répondre aux aspirations mystiques des âmes tourmentées par le besoin de croire à un futur monde meilleur.
11. Avec les complications scientifiques et industrielles des civilisations modernes, le rôle de l'intelligence a constamment grandi. Il en est résulté que les inégalités intellectuelles ont beaucoup plus d'importance aujourd'hui qu'autrefois. Les différences cérébrales entre les individus, l'ouvrier et l'ingénieur, par exemple, deviennent immenses et ne peuvent que s'accentuer. C'est, en réalité, vers une inégalité croissante que, malgré le triomphe apparent des idées démocratiques, marchent les sociétés.
(1) Tous les passages sont extraits de Le Bon G., 1931, Bases scientifiques d'une philosophie de l'histoire.
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