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EXERCICE 70, UNITÉ IV
3.1. Clarifier


CONSIGNE
A quoi servent les reformulations introduites par
et donc ?
- à passer du cas général à un cas particulier important pour le sujet abordé
- à passer du cas particulier au cas général
- à présenter l'une des implications importantes de ce qui vient d'être présenté
(Dans certains exemples deux valeurs sont présentes.)

EXEMPLE
[…] il faut réellement diviser par deux les émissions [de CO2] du monde d'ici à la moitié de ce siècle et donc de quatre à cinq celles des pays industrialisés pour ne pas dépasser de plus de 2 degrés la température moyenne du globe. (56 : 2006-2007)

RÉPONSE
La reformulation introduite par et donc sert à : passer du cas général à un cas particulier important pour le sujet abordé et présenter l'une des implications importantes de ce qui vient d'être présenté.
Passage de « monde » à « pays industrialisés ». Comme il s'agit d'un rapport du Sénat français, les implications pour les pays industrialisés sont importantes à souligner.



1. La proposition de loi [pour lutter contre l'anorexie] interdit la publicité en faveur des moyens de parvenir à une maigreur excessive et dangereuse. Les peines encourues sont de deux ans de prison et 30 000 euros d'amende, portées à trois ans de prison et 45 000 euros d'amende si la provocation a entraîné la mort. La cible essentielle de ces mesures est constituée des sites Internet qui se proclament d'une tendance née aux Etats-Unis à la fin des années quatre-vingt-dix, dite « pro-anorexie » ou « pro-ana ». Ils affirment que l'anorexie n'est pas une maladie mais un mode de vie. La visite de ces sites et la lecture des messages qu'ils comportent suscitent un profond malaise car ils témoignent de la souffrance des anorexiques, enfermés dans un monde sans rapport avec la réalité et qui persistent à nier leur maladie, ce qui en constitue d'ailleurs l'une des plus tristes caractéristiques. Auteurs et contributeurs sont majoritairement des adolescentes, même si l'on compte des garçons et de jeunes adultes. Ils ressemblent à la moyenne des quelque 50 000 anorexiques en France. Ces sites sont assurément dangereux : ils peuvent accentuer une crise anorexique ou contribuer à retarder la prise de conscience par l'entourage et les médecins, et donc mettre en péril le malade qui ne sera pas soigné. (1)



2. Les sites pro-anorexie correspondent […] à une forme d'expression de la maladie qui se retrouve dans leur caractère spectaculaire, provocateur et organisé. Ils distillent le message selon lequel les anorexiques constituent une élite persécutée, ce qui est caractéristique de la construction des identités adolescentes. L'interdiction légale ne peut que renforcer le sentiment de persécution et donc de communauté.



3. Tant que la principale crainte de l'homme était de perdre son âme, les garanties de sa sauvegarde étaient données par le prêtre. Dès lors que l'objectif premier est de préserver sa santé afin de préserver sa vie, le médecin devient celui à qui il est demandé de prononcer les autorisations et les interdits. Notre rapport au monde est donc structuré par la prescription médicale qui dicte notre façon de nous comporter, et notamment de nous alimenter. La manière dont nous choisissons les lieux que nous fréquentons et notamment ceux de nos vacances (la montagne ou bien le bord de mer, ses bains et ses embruns mais aussi le risque d'une exposition excessive au soleil), les objets qui nous entourent (à laver, à stériliser ou à jeter), les animaux domestiques, a été transformée d'abord par le souci de préserver la vie puis, aujourd'hui, par la volonté de la prolonger le plus longtemps possible. Nous nous efforçons de prendre soin de nous-mêmes, de notre entourage et de nos enfants en suivant les préconisations des médecins, transmises directement ou par l'intermédiaire de la presse. Car la maladie et la mort auxquelles les générations précédentes devaient se résigner sont devenues heureusement plus rares et donc de plus en plus intolérables.



4. On entend par troubles du comportement alimentaire l'étendue des rapports compulsifs et donc pathologiques à la nourriture, qu'ils se caractérisent par une consommation inférieure aux nécessités physiologiques ou au contraire excessive. Il est difficile d'en mesurer l'étendue exacte, encore une fois par manque d'études. A titre indicatif, un cours de pédopsychiatrie professé à l'université d'Angers indique que 10 % des jeunes filles brillantes issues des classes sociales favorisées souffrent d'une anorexie mineure autour de l'âge de dix-huit ans qui disparaît spontanément au bout d'un an. Le caractère particulièrement flou de cette affirmation indique que les troubles du comportement alimentaire ont des degrés extrêmement variables et difficiles à saisir sauf dans les pathologies les plus sévères.



5. Il est particulièrement difficile de mesurer les troubles du comportement alimentaire dans notre société et donc a fortiori d'en isoler un comme l'anorexie. L'augmentation des troubles du comportement alimentaire doit par ailleurs être resituée dans celle, plus générale, des comportements à risques et du mal-être adolescent.



6. On sait aujourd'hui que la part d'adolescentes touchées par l'anorexie est la même chez les noirs-américains que dans le reste de la population. On peut estimer qu'un phénomène analogue entraîne une sous-évaluation de cette maladie chez les hommes. La difficulté, ou la réticence, que peut avoir le patient à se penser comme atteint d'une maladie considérée comme presque exclusivement féminine est confortée par le diagnostic médical stéréotypé qui estime souvent que l'anorexie ne peut se rencontrer que chez les hommes ayant des troubles graves de la personnalité (c'est-à-dire des tendances « féminines »). Le cas de Jean-Philippe de Tonnac, journaliste et écrivain qui a souffert pendant quinze ans d'une anorexie non diagnostiquée et donc non soignée malgré le nombre de médecins consultés est de ce point de vue exemplaire. Il rejoint l'expérience du Groupement européen pour les anorexiques, les boulimiques et les familles, association de bénévoles qui assure une permanence téléphonique anonyme et reçoit de nombreux appels d'hommes désireux de comprendre ce qui leur arrive. Seule une meilleure éducation de la population et une meilleure formation des médecins peuvent permettre de remédier à cette sous-évaluation porteuse de souffrance et cause d'absence de traitement.



7. Le débat sur la valeur normative de l'IMC [indice de la masse corporelle] porte d'abord sur sa capacité à mesurer le poids. Une échelle spécifique a dû être développée pour les enfants afin de prendre en compte les nécessités de leur croissance. De même, au-delà de soixante-cinq ans, l'indice ne permet plus la comparaison en raison de l'évolution du squelette. « Attention à l'arithmomanie ! » avertit le docteur Xavier Pommereau, « l'IMC dépend de l'âge et ne prend pas en compte les différences de constitution », c'est-à-dire la masse musculaire et osseuse. Une maigreur constitutionnelle ou un corps trapu entraîneront des IMC bas ou élevés sans que le sujet soit dans un danger quelconque. Certains peuples peuvent donc considérer que leurs caractéristiques physiques ne sont pas celles auxquelles l'IMC se réfère. L'OMS est ainsi régulièrement interpellée par les gouvernements asiatiques sur l'inadaptation de l'indicateur à leurs populations et a mis en place plusieurs groupes d'experts successifs pour tenter de remédier à cette critique. Certains spécialistes envisagent même d'élaborer plusieurs IMC correspondant aux différentes constitutions des populations dans le monde. Pareil choix mettrait fin à toute possibilité de comparaison véritablement internationale des poids et donc de la progression de l'obésité.



8. La volonté de lutter contre des comportements jugés dangereux ne doit pas aboutir à imposer des normes corporelles. L'inquiétude de l'association Allegro fortissimo, signataire de la charte d'engagement volontaire sur l'image du corps et la lutte contre l'anorexie, mérite d'être soulignée. Considérer que l'incitation à la maigreur extrême – comme l'indique l'intitulé de la proposition de loi – et plus encore l'incitation à la maigreur excessive – comme le prévoit le dispositif – doivent être pénalisées revient à refuser qu'un corps puisse présenter ces formes de maigreur. L'introduction d'une norme dans un domaine qui se caractérise par la difficulté d'établir des absolus est la porte ouverte à de nombreuses dérives. La tentation sera ainsi grande de lutter contre l'obésité en utilisant la référence au même indice de masse corporelle, et donc en tentant d'agir sur les corps sans commencer par agir sur les causes.



9. La psychiatrie et la psychanalyse sont à ce jour les seules disciplines qui tentent de prendre en charge durablement les anorexiques. Il existe dans ces disciplines une vulgate sur les causes de l'anorexie qui s'est diffusée jusque dans l'opinion publique mais se trouve aujourd'hui contestée par les praticiens. Elle repose sur l'idée que l'anorexie résulterait d'une difficulté de la relation à la mère. Un premier débat oppose ceux qui croient, comme souvent, à la responsabilité d'une mère omniprésente et cherchant à tout contrôler à ceux qui estiment que la mère ne fait que transmettre malgré elle un conflit plus ancien, qui l'avait sans doute précédemment opposée à sa propre mère. On trouve à l'inverse la théorie selon laquelle c'est la responsabilité du père qui est en cause, soit psychiquement, soit physiquement, par l'exercice de violence ou d'abus sexuels. A ces parents, cause de l'anorexie par leur présence pathologique, s'oppose la théorie d'une anorexie due à une absence totale de structuration de la cellule familiale et à un désintérêt pour l'enfant. Enfin, on soutient aussi que ce sont les enfants eux-mêmes qui, indépendamment de toute violence, souffrent d'un deuil non fait ou n'acceptent pas la transformation de leur corps à l'adolescence avec ce qu'elle implique d'éveil à la sexualité et d'amorce du vieillissement, et donc d'annonce de la mort.



10. Le poids des missions confiées à la médecine scolaire étant immense et malheureusement sans proportion avec les moyens dont elle dispose, il est essentiel d'éveiller l'attention des parents au problème de l'anorexie. Celle-ci est particulièrement difficile à détecter car les pratiques alimentaires anormales sont discrètes (absence des repas en famille ou vomissements) voire masquées par la tendance qu'ont certaines anorexiques à cuisiner pour nourrir abondamment leur entourage. Par ailleurs, l'isolement des anorexiques et leur enfermement dans les pratiques sportives et les études font d'elles des adolescentes modèles aux yeux des parents inconscients de leur souffrance. Pourquoi penser que sa fille et plus encore son fils, est malade alors qu'il est un bon élève, actif et qu'il ne semble pas être entraîné par les phénomènes de groupe qui affectent les autres adolescents de son âge ? A l'inverse, il ne faut pas craindre le pire dès qu'une adolescente souhaite faire un régime ni employer le terme anorexie de manière triviale. Des conférences faites par des spécialistes sont particulièrement utiles pour permettre aux parents de détecter les symptômes et donc d'imposer un traitement médical à leurs enfants malgré les dénégations de ceux-ci concernant leur maladie.



11. Un diagnostic précoce est le gage d'une meilleure efficacité du traitement. Pour cette raison, tous les spécialistes auditionnés par votre rapporteure se sont émus de l'absence de formation des médecins généralistes pour détecter les signes de l'anorexie chez les patients et les adresser aux structures adaptées. Il en est de même au sein de la psychiatrie où la maladie reste mal connue et donc mal traitée par ceux qui n'y consacrent pas leur pratique. Ici encore une formation initiale et continue est souhaitable.



12. L'article 223-14-1 nouveau vise à créer un délit de provocation à la maigreur modelé sur celui de la provocation au suicide. Toutefois, contrairement à ce dernier délit, critiqué pour l'imprécision de sa définition, une triple précision est proposée pour l'élément d'incrimination matérielle : d'abord, quant au but de la provocation qui serait, dans le texte issu de l'Assemblée nationale, le fait de « rechercher une maigreur excessive » et non « extrême » ou « inciter à l'anorexie » comme l'envisageait le texte initial ; ensuite, quant au moyen mis en œuvre, en citant précisément l'encouragement à des restrictions alimentaires prolongées ; enfin, quant à l'effet de tels comportements, c'est-à-dire le danger de mort ou la compromission de la santé. En outre, l'élément d'incrimination morale reposerait sur des infractions intentionnelles et non d'imprudence. Le choix d'une définition légale aussi détaillée se justifie par l'objectif de bien cerner l'objet du texte, et donc d'en exclure les jeûnes rituels, les régimes, les traitements et les grèves de la faim.



(1) Tous les extraits sont tirés d'un rapport du Sénat sur l'anorexie (439 : 2007-2008).



 
 
 

 

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